Comme au Québec, le vendredi soir, nous sommes claqués! Nous n'avions pas décidé de l'horaire du weekend... En attendant notre repas chez Ulysse (meilleur burger de Nouméa), je prends le guide télé de la semaine. En feuilletant les pages, je vois... Ouverture de la tribu Table-Unio sur réservation seulement... repas, randonnée pédestre... J'appelle pour faire une réservation sur ce qui allait être une merveilleuse journée!
Dimanche 6:30 AM, on part vers La Foa. 7:55, on arrive à la route qui mène à la tribu.. . J'appelle la dame pour lui dire que nous serons peut-être un peu en retard... Elle dit: Casse pas la tête! On vous attend! "Casse pas la tête" ou « Y’a pas de souci » c'est la devise du pays! Même que Marc me le dit maintenant lorsque je m'énerve! Je le regarde de mes yeux pointus et je réponds: Ok je ne me casse pas la tête mais il faudrait planifier...je ne sais pas si c'est deux ans me seront thérapeutiques...C'est vrai, je l'avoue, je me casse tout le temps la tête! Après 55 minutes de routes chaotiques mais avec une vue paradisiaque... Falaise, rivière, cascades, forêt humide, plantations et chevaux sauvages. Et oui, on doit attendre sur la route car les chevaux se promènent tranquillement. Lorsque nous prenons des virages en épingles, on voit devant nous comme des murs de verdure. Marc dit: "On dirait un fond d'écran d'ordinateur". Par la suite, à chaque virage, on se dit que l'on a changé d'écran. On arrive enfin à la commune de la tribu. Nous sommes accueillis par Eliane qui est la gérante. Elle nous présente la famille et nous offre le café! Elle explique qu'aujourd'hui c'est un peu spécial car ils reçoivent la visite du pasteur. Il vient de Nouméa à chaque mois. Sa fille fait l'école aux enfants, puis le pasteur fait le culte au temple et prend le repas avec toute la grande famille de la tribu. Lorsque le pasteur arrive, on sort de table et il nous fait le bonjour. Faire le bonjour, c'est remercié la famille de l'accueil et il offre à la famille du tissu (pour faire des robes mission, des nappes, des rideaux...) dans lequel, il y a un peu d'argent et des cigarettes. Merde! J'avais oublié pourtant je le savais... La famille a aussi donné des coupons de tissus à la femme du pasteur. Eliane nous demande si l'on veut partir tout de suite en randonnée. On leur demande si l'on peut plutôt aller au Temple avec eux et que l'on ferait la rando en PM. Elle en parle au pasteur et il est même très content. Pendant que le pasteur fait l'école avec sa fille, je vais aider les femmes à la cuisine et Marc reste à parler avec les hommes. Le partage des tâches culinaires n'est pas arrivé dans la tribu.
D'ailleurs, je devais essorer avec un linge de la chouchoute râpée... à la maison, je le fais pour mes carottes râpées lorsque je fais un gâteau mais je demande à Marc ou à Philippe. Une des dames voyant que j'ai un peu de difficulté me regarde les mains et dit: "Mais c'est que tu as des mains de poupée!" Je lui réponds que je vais aller chercher Marc. Elle me dit: " Laisse ton mari faire du blabla, les hommes aiment cela et nous, on est bien entre les femmes ici... Alors, j'ai compris pas d'homme dans la cuisine. J'ai réussi en mettant moins de chouchoute à la fois dans le linge. Je me sens un peu comme Martin Picard... On prépare un braisé de cerf (qui a été chassé par Michael, un des ado de 19 ans), on prend les chouchoutes directement dans les arbres qui nous entourent, il y a un des hommes qui nous apporte un plat rempli de crevettes de rivière qu'il vient de ramasser et un autre arrive avec une anguille. Je coupe les tomates sur une bûche de bois coupée en deux et supporter sur deux roches.. la bûche a été enduite d'huile de coco! La fille d'Éliane prépare la noix de coco pour faire le riz. Elle me demande qu'est-ce que je prends pour préparer mon lait de coco.... J'ai vu la déception dans son visage lorsque je lui ai dit que je l'achetais en boîte... Je lui ai expliqué qu'au Québec, il n'y avait pas de cocotier... J'ai regagné des points quand je lui ai expliqué que nous avions un potager et qu'il fallait faire des réserves! Les grands-mères sont assises et préparent du choux Kanak (cela goutte les épinards).
Lorsque tout est sur le feu, Eliane nous emmène visiter la commune. Les potagers, les plants de piment fort (elle m'en ramasse), bananiers, mangues, litchis, café, jacquiers (le fameux jack fruit de Marc en Jamaïque!!!)... Puis, on voit les enfants qui jouent à la corde à danser mais avec une liane. Je les initie à: " Les douze mois de l'année sont...".
La cloche du temple sonne! La cérémonie est composée de chants, de témoignages, de la communion et de la bénédiction. Le pasteur fait chanter les grands-mères en Walou. C'était très beau!
Après la cérémonie, j'aide les femmes à mettre les plats sur la table...C'est fou, on ne mangera pas tout ça! Le pasteur bénit ce repas et remercie la nature de nous donner tant de provisions. C'était vraiment bon et copieux! Eliane s'assure toujours que Marc ne manque de rien. Elle lui apporte des crevettes de mer. (Je ne savais, mais il ramasse également des crevettes de rivières, lorsque la chaleur de l’été revient !). On se sent vraiment en famille. Il y a les grands-mères devant nous. Elles ont plus de 85 ans et elles vont tous les jours au champs. D'ailleurs, chacune d'elles a son propre potager. Il y a la coquine que j'appelle Christine car elle fait sa coquette avec son foulard de léopard. Il y a celle qui rit à chaque phrase que Marc dit même si ce n'est pas drôle! Pour dessert, on nous offre des plats de framboises sauvages et de papayes.
Ce fût tout un festin !
Après le repas, mes nouvelles amies ne veulent pas que je les aide à faire la vaisselle car elles veulent que je profite de la randonnée. Comme je suis pleine, c'est assez bienvenue! Nous partons avec Michael, un jeune guide de 19 ans. J'ai pensé à ma mère qui aurait aimé partir seule dans la forêt avec un guide qui tient la machette. Eliane nous avait donné de gros plats pour que l'on ramasse des framboises. Au début, j'essayais d'aller plus au fond des plants mais voyant l'abondance, on s'est mis à cueillir que sur le bord de la route. En voulant aller chercher des framboises plus loin, je me suis égratignée assez profondément. Michael voyant la blessure me donne une feuille de goyave et me dit de la mâcher puis de cracher le tout sur ma jambe. Le goût m'a levé le cœur mais cela a fonctionné! Ça brulait au début mais le saignement a arrêté. La randonnée était super car Michael, qui était gêné au début, nous racontait ses techniques de chasse aux cerfs, aux cochons sauvages et aux roussettes. Il pouvait identifier le chant des oiseaux et nous faisait faire de l'observation. On est allés voir les nids de roussette (c'est une chauve-souris endémique qui est gigantesque). Une chance que l'on en a pas vu. J'avais averti Michael que j'allais sûrement être hystérique si l'on en voyait une. Après la rando, on fait la bise et remercie tout le monde. Lorsque nous sommes partis, les enfants, Eliane et Michael se mettent sur le bord de la route pour nous saluer et nous crier: "À la prochaine"! Oui, on y reviendra, c'est promis!
Ce fût une journée mémorable qui m’a remis les valeurs de famille que l’on préconisait un peu plus lorsque que nous étions plus jeunes. Le dimanche c’était la visite chez grand-mère Yvonne et toute la famille se réunissait autour d’un bon repas ou juste pour prendre une bière ! C’était le bon temps où tous les magasins étaient fermés le dimanche et c’était sacré de se visiter et de prendre le temps de se raconter des peurs ! Et bien je suis contents de voir qu’il y a encore des gens sur cette terre qui maintiennent ces traditions de famille ! Eh oui, encore un brin de nostalgie de ma part ! C’est vrai que la distance a bien de l’importance…!
PS : Merci à tante Marielle Gagnon pour son petit courriel et à ma p’tite sœur Julie pour son récit ! Écrivez-nous !
Au plaisir de vous lire !
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